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daiboudemwa

4 mai 2016

Contrariété

Damien n'a pas répondu à mon texto.

Damien n'a pas répondu à mon texto et je suis contrarié.

Damien n'a pas répondu à mon texte et je suis très contrarié.

Damien n'a pas répondu à mon texto et je n'arrive pas à lui dire cette contrariété.

C'est un sentiment en embuscade. D'abord une attente qui se mue en incompréhension puis lentement subrepticement en contrariété. C'est pas grand-chose au départ : un point au détour d'un genou ou d'un coude. Et puis ça grandit, ça s'étend dans les veines, sur la peau. Ca finit par prendre un place inconsidérée. Et ça voudrait crier, hurler.

« ça m'a contrarié que tu ne répondes pas à mon texto... » J'aurais pu lui dire ce matin quand je l'ai aperçu dans les vestiaires du studio de danse. Mais ça n'est pas sorti, ça ne peut pas sortir.

Alors j'ai dansé, le regard et les émotions fuyants. Lui derrière ou à côté. Et moi loin, le plus loin.   

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24 avril 2016

Une rencontre

Suis monté dans l’autocar pour Marseille et j’ai entendu « vous rappellerez à votre amie que c’est interdit de s’arrêter sur un arrêt de bus, elle peut se prendre une amende ! » Moi j’ai dit  bonjour au chauffeur et « vous avez tout à fait raison c’est interdit, et vous avez raison de me le rappeler... » Il a souri.

Me suis avancé dans l’allée, me suis assis et ai entendu « personne respecte les règles de la route de toute façon.. » Me suis retourné.

«  C’est vrai que pas mal de gens ne respectent pas les règles mais c’est pas une raison », ai-je répondu à l’unique voyageur, jeune homme déjà assis qui venait de m’interpeler. . 

Voilà . Ca a commencé comme ça. Aussi simplement que ça.

Et puis nous avons continué à discuté. Moi de mon métier d’enseignant, lui de son métier d’ouvrier, de sa jeunesse.  De sa copine, de ses origines algériennes, de l’élève « turbulent » qu’il était au collège, de son collègue qui vit dans un HLM tellement bruyant qu’il a dû voir un psy. De Bordeaux, de mes origines françaises, de l’enfant si sage que j’étais à l’école, de mes débuts dans les quartiers-Nord de Marseille.

J’ai été ému par ses mots parfois maladroits, son usage de l’impératif systématiquement incorrect. Je me suis demandé aussi pourquoi l’Ecole n’avait pas permis à ce jeune homme si enjoué, si enthousiaste, si courageux de maitriser ce putain de mode impératif !

On  a parlé encore et encore presque une heure.  

« Et vous vous êtes marié ? m’a-t-il demandé.

- Non.

- Vous avez des enfants ?

- Non.

- Et vous en voulez ? » 

J’ai attendu un peu, pas longtemps, quelques secondes et puis …

« Tu sais, j’ai un copain, je suis homosexuel, c’est pas vraiment simple aujourd’hui en France d’avoir un enfant. Je ne me pose pas vraiment la question en fait… »

Je ne sais pas pourquoi je me suis inventé un copain.

« Et vous êtes heureux ? m’a-t-il demandé.

 C’était si sincère que j’ai eu envie de l’embrasser.

On a parlé homophobie racisme société où tout va trop vite éducation avenir.  

A la sortie du car, il m’a tendu la main : « Vraiment j’étais content de vous avoir rencontré.

- Moi aussi et soyez heureux ».

Il s’appelle Karim, il a 24 ans, il vit à Martigues. Une rencontre. 

3 avril 2016

Enfoiré de Téchiné

Je suis sorti du cinéma et il pleuvait. Merde je me suis dit. Je suis sorti du cinéma et il pleuvait. Il pleure dans mon coeur comme il pleut sur la ville je me suis dit. J'ai attendu un instant et je me suis dit qu'il n'arrêterait pas de pleuvoir. Alors j'ai traversé ces larmes urbaines dans la nuit. J'ai traversé ces larmes l'âme chavirée par le dernier film de Téchiné. Enfoiré de Téchiné. Je me suis dit que ces deux garçons qui se battent s'effleurent se méprennent laissaient béante ma propre adolescence. Que j'aurais voulu tellement voulu moi aussi battre méprendre effleurer. Je me suis revu dans la cour du lycée sur les bords d'un lac au crépuscule dans un jardin public surplombé d’immeubles les pieds glacés par les remous d'une rivière de montagne seul. Seul. Alors j'ai vu le trottoir humide de mes larmes et de la pluie. Ça fait mal je me suis dit. Ça fait triste, triste comme une chanson d'Alex Beaupain. Je me suis dit. 

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daiboudemwa
  • Quelques mots au coin des doigts et du cœur. Scènes de travail ou d’amitié, scènes d’enfance, scènes de bonheur, de bleus à l’âme… Je me demande ce que je vais dire, ce que je vais leur dire, ce que je vais vous dire.
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